ACR en contexte sectaire
Carte d'appel
Code Clawson : 9-E-1 (Arrêt cardiorespiratoire confirmé, respiration absente ou inefficace)
Heure de l'appel : 05 h 02
Âge et sexe du patient : Homme de 58 ans
Lieu de l’intervention : Demeure privée en région rurale, identifiée comme un lieu de culte spirituel
Déclaration de l’appelant : « Il ne respire plus ! On prie autour de lui, venez vite ! »
Mise en situation
Âge et sexe du patient : Homme de 58 ans
Plainte principale : Inconscience, respiration absente
Observation de la scène et du patient : À l’arrivée, une dizaine de personnes sont agenouillées autour du patient, en transe, chantant et psalmodiant des prières. Le patient est allongé au sol, immobile, sans surveillance médicale, les membres entourant le corps refusant de s’écarter à la demande initiale. Il faut insister fermement pour accéder au patient, certains membres affirmant : « Il reviendra par la lumière divine, il ne faut pas le toucher ! » L’ambiance est tendue, presque hostile.
Examen primaire
L (Level of consciousness) : Inconscient, aucune réponse
A (Airway) : Obstruction partielle par langue, manœuvres de repositionnement effectuées
B (Breathing) : Aucune respiration détectée
C (Circulation) : Pas de pouls carotidien
D (Disability) : GCS 3
E (Exposure) : Aucun trauma visible, vêtu de manière rituelle
Décision : début immédiat des manœuvres de RCR et installation du MDSA malgré l'interférence verbale du groupe.
Signes vitaux initiaux
Pouls : Absent
SpO2 : Non mesurable
Pression artérielle : Non mesurable
Respiration : Absente
Température : 35,8 °C (ambiance froide dans la pièce)
Glycémie : 7,0 mmol/L
Anamnèse
Impossible à obtenir de façon complète sur les lieux en raison du comportement désorganisé et mystique du groupe.
Selon une femme se présentant comme « guide spirituelle », l’homme aurait « reçu une vision puis s’est effondré au sol, pris d’un tremblement divin ».
S - Aucun renseignement fiable
A - Inconnues
M - Aucun médicament trouvé sur les lieux
P - ATCD cardiaques rapportés par un membre « proche de lui »
L - Aucun repas mentionné
E - Participation à un rituel de jeûne et de méditation extrême depuis 36 heures
R - Tabagisme ancien, antécédent d'infarctus (selon un proche)
Examen secondaire
Examen physique :
Pas de signes de traumatisme
Cyanose des extrémités
Pâleur généralisée
Mydriase bilatérale, non réactive
Pupilles : Fixes et dilatées
12D : Aucune activité électrique détectée initialement (asystolie)
Traitement et techniques
Application du protocole ACR
Début des compressions thoraciques dès l’évaluation de l’absence de pouls
Administration d’oxygène à 100 % via ballon-masque
Installation de l’accessoire supraglottique LMAMD
Défibrillateur (MDSA) branché : rythme initial en asystolie
Moniteur cardiaque : pas de changement après deux cycles
Assistance policière demandée sur la scène pour entrave à l’intervention médicale
Évolution du cas
Après 10 minutes de réanimation sans retour à la circulation spontanée (RCSP), la condition demeure en asystolie persistante. Une équipe policière arrive sur les lieux pour assurer un corridor sécurisé vers l’ambulance, alors que certains membres crient que « les machines empêchent le retour de l’âme ». Le patient est transporté sous RCR active jusqu’au centre hospitalier désigné. Décès constaté à l’urgence par le médecin après absence prolongée d’activité cardiaque.
Hypothèses cliniques à considérer
Infarctus du myocarde massif
Déséquilibre hydro-électrolytique en lien avec jeûne prolongé
Hypoxie sévère secondaire à perte de conscience non traitée
Décès évitable si intervention rapide avait été autorisée
💡 Point pédagogique : Lors d’un ACR, toute entrave aux soins par des tiers doit être gérée avec calme, mais fermeté. Le recours aux services policiers est justifié en cas d’entrave active aux soins de réanimation, même dans un contexte religieux ou culturel sensible.